La mécanique des vins. Le réenchantement du Languedoc
Grasset, 2016
Il y a des lectures qui s’imposent à vous comme une évidence et c’est exactement le sentiment que j’ai eu au fil des pages de La mécanique des vins. Au-delà de mon intérêt pour le vin, ce livre m’a profondément touché, le sujet ne devenant parfois qu’un prétexte.
Ce livre est à la fois parsemé de moments méditatifs, de beaux échanges, de mots simples, de sentiments authentiques. Sa poésie ne se trouve pas uniquement dans les Etats d’âme, petits poèmes distillés au fil des pages et reflets de la cuvée du même nom. Cette poésie accompagne le lecteur tout au long du livre, sous différentes formes.
J’ai tout particulièrement aimé le chapitre « Le temps qu’il fait », ensemble de notes sur les conditions climatiques et leur influence sur la vigne de 1985 à 2014. Ce qui pourrait s’avérer une lecture fastidieuse devient ici passionnant grâce à la justesse des mots qui sonnent justement comme de la poésie : « 1986. Du débourrement à la maturité des raisins, pas une goutte d’eau. Six mois de sécheresse, plus une feuille au cœur des souches. C’était l’automne en plein été. A se demander comment la vigne a réussi à amener les raisins jusqu’à la vendange. Première année d’égrappage. » On vit chaque saison intensément au travers de ces brèves descriptions et on comprend les choix fait au fil du temps. Le rapport aux temps (chronologique, psychique et climatique) est très marqué, à la fois respectueux, contemplatif, curieux, sensible, tout en restant pertinent dans les choix menés pour s’adapter et accompagner la vigne vers les meilleurs résultats selon les conditions. Cette rétrospective sur trente années fait vraiment sens pour aider à la compréhension d’un domaine et de son évolution. Ce chapitre démontre que toute l’attention aux temps, au terroir et à l’environnement fait souvent un grand vin.
Cette harmonie se ressent aussi fortement dans le chapitre sur la biodynamie. Olivier Jullien en fait une synthèse très juste : « Que je parle du calendrier lunaire, du mouvement des planètes, des pulvérisations dynamisées de bouse de corne ou de silice, que j’utilise sous un autre plan des tisanes de plantes, des purins, des poudres de roches, des lacto-fermentations ou autres, l’important n’est pas de nommer les choses, ni même de les faire, l’essentiel, c’est l’intention, la présence globale dans le geste et sa dynamique dans un système d’intégration horizontale.«
Le découpage du livre, sa structure, les thèmes abordés font de ce livre un objet à la fois très personnel et universel, contant la condition d’un paysan moderne ayant toujours suivi ses intuitions tout en expérimentant, en dehors de toute chapelle, sans dogme, le tout avec beaucoup de courage et de travail.
Je ne saurais que trop vous conseiller ce voyage enchanteur en terre d’Oc.