Début novembre, les amateurs de vins vivants avaient rendez-vous à Lyon pour la 4e édition du salon Sous les Pavés, la Vigne. Ce salon, initié à Paris il y a 5 ans en partenariat avec Rue89 et fort de son succès, a déjà développé deux éditions en Province (Bordeaux et Lyon). Cette année, à Lyon, près de 2000 personnes étaient venues découvrir les vins de la nouvelle garde mais aussi rencontrer les défricheurs du vin naturel.

Le salon inaugurait le mois du vin naturel à Lyon. Un événement qui propose différentes animations festives afin de faire découvrir aux amateurs et autres curieux des vins bien ancrés dans leur terroir en invitant des vignerons à des dégustations au fil du mois de novembre.

Cette année, je ne venais pas uniquement en tant que simple amateur de bon jus, mais également pour rejoindre l’équipe organisatrice afin d’aider au bon déroulement du salon sur le weekend. Rendez-vous était donc pris le samedi matin avant l’ouverture du salon.

Pour exister, un salon comme celui-ci nécessite une équipe formée sur la base du volontariat. Venir aider à l’organisation de ces rencontres, c’est soutenir dans leur démarche les vignerons présents en assurant la fluidité des événements sur le weekend. Nous étions donc une vingtaine à répondre présents pour soutenir le salon et les vignerons. Amateurs, futur professionnels, étudiants, journalistes de l’équipe locale de Rue89, tous animés par le souhait que chaque visiteur reparte avec un souvenir agréable du salon et que les vignerons puissent leur consacrer le temps nécessaire pour faire découvrir leurs vins en toute tranquillité.

Des cuisiniers itinérants étaient installés dans le grand hall du Palais de la Bourse pour nous régaler de lasagnes maison et de charcuteries locales (La Cuisine itinérante) ainsi qu’une fromagère qui proposait de beaux produits du terroir et des tartines grillées à la raclette qui distillaient leur parfum d’après-ski à l’entrée du salon.

Le bal des Ardents, un libraire lyonnais, proposait toute la lecture vinique essentielle pour comprendre les vins actuels. Le stand accueillait également les auteurs de livres récemment parus chez Nouriturfu, la toute jeune maison d’édition des organisateurs du salon, Antonin Iommi-Amunategui et Anne Zunino, ainsi qu’aux éditions de l’épure. Nora Bouazzouni a fait carton plein avec son récent ouvrage, Faiminisme : quand le sexisme passe à table, et Olivier Grosjean et Isabelle Guichard venaient présenter respectivement De profundis gustatibus et Précis à l’usage de ceux qui pensent que Demeter n’est qu’une déesse grecque dans la collection Mise en appétit aux éditions de l’épure. François Caribassa présentait également Qu’est-ce que boire ? Critique de la dégustation des vins, un livre à mettre en toutes les mains des buveurs amateurs et complexés ! Enfin, Fols de Silène apportait sa part de poésie avec de belles illustrations inspirées par les métiers du vin.

Côté vignerons, j’ai rendu visite à Emilie et Emmanuel Rybinski du Clos Troteligotte, installés dans le Sud-Ouest et venus présenter leurs AOC Cahors ainsi qu’un Chenin en IGP du Lot. Installés sur une appellation en plein renouveau, ils produisent des vins en biodynamie, sans levures exogènes ni quelconque intrant, limitent les sulfites et réussissent même à s’en passer sur certaines cuvées. L’occasion donc de découvrir leur chenin sans sulfite, droit, parfumé et élégant, élevé en jarre de terre cuite, il évoque le terroir ligérien. L’ensemble des rouges présente des différences bien marquées selon les terroirs et les choix de vinification. J’ai été particulièrement charmé par le fruit de K-Pot’, le rouge sans sulfite maison. Un vin bien élevé mais quand même dense et croquant, qui se boit sur la jeunesse, légèrement rafraîchi. Et puis il y avait K-2… On atteint alors les sommets de l’AOC Cahors, beaucoup de sensibilité et de pureté dans ce vin, révélateur de la richesse des parcelles dont il est issu. Seul le prix peut vous retenir devant un tel vin (30 euros, quand même…).

Les Champagnes de Frank Pascal m’ont aussi beaucoup touché. Du très beau travail en biodynamie depuis une quinzaine d’année, complété par d’autres méthodes alternatives dans la conduite de la vigne (travail sur les énergies en particulier) favorisant la vie microbienne des sols et l’autonomie de la vigne. Frank est un vigneron passionnant et je vous conseille de prendre le temps de consulter son blog qui l’est tout autant. Ses champagnes sont animés d’un bel esprit. Ce sont des vins vibrants qui éveillent les sens. Je me suis régalé sur la cuvée Tolérance en rosé ainsi que sur le Quinte-Essence, un champagne vineux, bien mâture mais tout en délicatesse.

Les Vins de Lavie est un tout jeune domaine situé dans le Bugey, géré par de jeunes vignerons lucides sur les enjeux de la viticulture d’aujourd’hui et influencés par le travail de Jean-Christophe Pellerin, père de la biodynamie dans le Bugey. Guillaume Lavie et Aline Ziemniak ont également fait, dès le départ, le choix de la biodynamie et des méthodes douces, à la vigne comme au chais. Ils s’intéressent aussi à l’interaction de la vigne avec les troupeaux ovins pour favoriser la biodiversité. Afin de faire connaître et développer leur activité sur 1,5 hectares, ils partent à la rencontre des amateurs sur les salons et je ne saurais que trop vous conseiller de participer à cette belle aventure en acquérant, par exemple, quelques bouteilles de leur délicieuse Mondeuse ou leur fin Pinot. Troisième vendange cette année et de jolis vins en devenir.

Puis, belle échange avec Thomas Finot sur sa marotte, les cépages autochtones ! Il sublime d’ailleurs le Persan, cépage originaire de la Maurienne, dans une interprétation moderne sur de beaux terroirs alpins. Un vin dense et puissant, de garde assurément ! Je découvrais également l’Etraire de la Dhuy, autre cépage oublié en train de renaître grâce à des vignerons passionnés qui nous font appréhender les sensations perdues de ces vins rouges minéraux, droits, un peu rustiques et qui demandent un peu de patience pour en profiter pleinement.

Le Roussillon était représenté par la nouvelle garde, moderne et décomplexée avec, entre autres, La Face B et le Vin des Potes. Les premiers venaient de Calce présenter un premier millésime. Pour l’instant, ils produisent un rouge, un blanc, un rosé ainsi qu’un pétillant naturel en collaboration avec vigneron du Limoux (pour l’AOC Blanquette de Limoux). Ici aussi des vins prometteurs, en particulier, Peaux Rouges, un vin rouge bien gourmand avec une belle longueur en bouche. Le Vin des Potes quant à lui, est un concept original puisqu’il s’agit de vinifier au domaine des raisins achetés à différents vignerons et proposer une gamme de vins bien perchés aux noms qui le sont tout autant – Fatal(e), La Botte Secrète, Melting Potes. Ce jour-là, leur Cinsault accompagna à merveille mon déjeuner : un plat de lasagnes aux légumes.

Petit détour vers le Piémont où souffle un vent de liberté avec les vins de Silvio Morando. Le grignolino, cépage autochtone, mis en beauté dans la cuvée Anarchico, un vin d’une (très) grande buvabilité ou le DOC Monferrato, délicat avec une belle acidité. Des vins comme ceux-ci me vont voyager jusqu’au cœur des collines piémontaises. Un vrai bohneur !

Enfin, coup de cœur sur les vins de Jean-François Malsert, installé en Ardèche sur 5 hectares où il a créé le Domaine de l’Iserand tout récemment – 2017 sera le troisième millésime du domaine. Super vigneron, super vins : Viognier, Syrah et Saint Joseph ainsi qu’une cuvée insolite où la Syrah part à la rencontre du Grenache du Sud- Ouest. Le grand écart pour un résultat puissant et aromatique. De purs jus à acquérir rapidement si ce n’est déjà fait !

P.S : Bien évidemment, je n’aurais pas manqué de faire un détour chez les « papas » Dominique Derain, Marcel Richaud et Pierre Frick, histoire de replacer les choses dans leur contexte en goûtant les jus précurseurs de ces artisans du vin naturel.

P.S 2 : D’autres coups de cœur sur le blog d’Olivier Grosjean : http://www.leblogdolif.com/