Fin octobre, j’ai participé à une journée d’élaboration des préparations automnales organisée par l’Association Romande de Biodynamie (ARB) (1). L’occasion d’aller sur le terrain pour comprendre en quoi consistent les préparations réalisées à cette saison et comment elles seront utilisées au printemps prochain. Direction la Suisse voisine, à Saint-Prex sur les rives du lac Léman, au pied des coteaux vaudois où quelques vignerons travaillent en biodynamie et produisent des vins généreux et floraux principalement à base chasselas.

La Fondation Perceval, partenaire de l’ARB, accueillait les participants à cette journée pratique. La Fondation est un petit hameau paisible en bordure de la commune de Saint-Prex et comprend une ferme conduite en biodynamie sur 10 hectares ainsi que 5000 mètres carrés de maraîchage. La Fondation Perceval, créée en 1967, s’est donné pour mission d’accueillir les personnes en situation de handicap et d’offrir aux résidents des conditions de vie favorisant leur développement personnel, tout en leur permettant d’occuper une place valorisante au sein de leur environnement social.

Nous avons été accueillis par Oscar Stoll, le coordonnateur des ateliers agricoles et espaces verts. Oscar pratique la biodynamie depuis 25 ans. Il conseille également des vignerons locaux et leur fournit les préparations biodynamiques pour la vigne. Il a une approche complète de la biodynamie, à la fois pratique et spirituelle. Il expérimente beaucoup : c’est pour lui un des fondamentaux en biodynamie : pas de recette, il faut expérimenter selon son environnement et sa sensibilité, parfois se tromper, et essayer de nouveau. C’est comme cela que l’on peut avancer parallèlement à l’échange avec d’autres agriculteurs. Et nous allons le constater lors de cette journée riche en enseignements.

Pour nous accompagner lors de cette journée découverte, Oscar était accompagné de David Leroux, responsable du maraîchage et Jacky Guillemet, un autre passionné qui étudie la biodynamie depuis plus de 25 ans et travaille à la réinsertion sociale par l’agriculture biodynamique dans le Tarn.

La journée commença avec l’introduction aux préparations à réaliser.

Avant la mise en terre, toutes ces préparations sont enveloppées dans des organes d’animaux. Les enveloppes animales ont un rôle de condensateur, de potentialisateur de certaines forces, alors que les substances (plantes) ont un rôle de réceptacle. Les organes animaux sont l’expression de forces particulières, lesquelles s’expriment également d’une manière archétypale dans certaines plantes, d’où un rapport fonctionnel entre ces deux règnes : par exemple l’achillée millefeuille et la vessie de cerf ; le pissenlit et le mésentère de bovin ; etc. Ce rapport est la cause des actions thérapeutiques de certaines plantes. Le produit obtenu est hautement énergétique (2). Ensuite, ces préparations sont enterrées tout l’hiver, moment où elles bénéficieront des forces de vie du sol, particulièrement actives à cette période, ainsi que des influences du cosmos.

Les lieux où les préparations seront enterrées sont importants : le plus souvent, un terrain bien drainé avec une exposition optimale selon la préparation. L’achillée sera enterrée dans une prairie abritée, orientée nord-est, à l’orée du bois. La camomille, quant à elle, sera conservée dans le sol d’une clairière exposée nord-ouest, Enfin, le pissenlit résidera pour l’hiver dans un terrain plat, exposé aux rayons du soleil tout au long de la journée. L’heure à laquelle ces travaux sont effectués a également son importance. Aussi, Oscar insistera-t-il sur la qualité de matières premières organiques et le soin apporté à la réalisation des préparations afin d’assurer les meilleurs résultats au printemps. Réaliser ces préparations en pleine conscience participe à leur réussite.

Ces préparations seront déterrées au printemps. Issues d’un procédé de sensibilisation (la terre est sensible aux informations du cosmos), les matières ainsi produites sont prêtes à être incorporées au compost. Les préparation 500 et 501 seront quant à elles directement pulvérisées sur les cultures.

Nous avons également fait un détour par les composts réalisés début octobre. Huit composts, avec des mélanges différents à base de matières organiques (végétales et animales), qui seront testés au printemps prochain. La température relevée y est en moyenne de 50°C ! Avec un pic à 63°C quelques jours avant notre venue. La décomposition des matières organiques bat son plein, mais il faut rester vigilant car au-dessus d’une certaine température (entre 65 et 70°C), ces matières brûlent – c’est cet aspect un peu cendré que l’on retrouve parfois dans notre tas de gazon laissé dans un coin du jardin l’été par fortes chaleurs– et perd tous ses bienfaits.

Oscar réalise également des tests cette année sur des Compost de Bouse Maria Thun (3). Chaque compost est disposé dans des cuves en bois enterrées de 50 litres chacune. L’un a été brassé au bras pendant une heure, puis le second a été brassé mécaniquement (à la main, mais avec un outil) pendant une heure également. Par ses deux méthodes, il est question d’observer l’implication du geste de l’agriculteur et ses effets sur ces préparations. Reste à savoir comment ces deux préparations réagiront lors de leur utilisation.

Nous avons fini l’après-midi par un détour au magnifique potager, à la fois sauvage et entretenu, où quelques légumes poussent encore en ce mois d’octobre, afin de sortir de terre l’ortie enfouie au printemps. Malheureusement, les aléas climatiques de l’été dernier auront réduit l’ortie à une simple poussière inutilisable.

En début de soirée, une conférence était organisée autour du thème Liens entre les préparations biodynamiques du compost et les planètes, les zodiaques. Encore un sujet qui permettra d’élargir sa compréhension de l’agriculture biodynamique et l’influence des astres sur le vivant.

Parmi les nombreux échanges ce jour-là, l’essentiel aura été pour moi de constater que la biodynamie n’est pas une croyance occulte, pseudo-scientifique, comme on peut parfois l’entendre. Elle est le fait de recherches et d’expérimentations, et les résultats sont là, tout simplement. De nombreux travaux, principalement ceux de Maria Thun, ont permis de mettre en évidence et de façon incontestable les influences cosmiques sur le développement des plantes. Egalement, la cristallisation sensible permet de connaître les qualités vibratoires d’un produit (ses énergies, son histoire, ses caractéristiques gustatives, etc.) et ce sera pour moi un prochain sujet passionnant d’exploration de la biodynamie.

Pour en savoir plus sur ce type de journée de préparations biodynamiques, je partage un lien vers des infos très détaillées sur une autre expérience en France à Truttenhausen dans les Vosges : http://malich1969.free.fr/Malich/BPREA/Pages/La%20Biodynamie.htm

  1. L’Association Romande de Biodynamie, partenaire de Demeter pour la partie francophone de la Suisse, organise régulièrement des journées de formation et d’information pour les professionnels en conversion vers l’agriculture biodynamique mais également pour les particuliers curieux et intéressés par ce mode de culture. Elle collabore avec différents domaines agricoles et viticoles dont, entre autres, celui de Marie-Thérése Chappaz à Fully.
  2. Réf. Site de l’Association Romande de Biodynamie, Novembre 2017
  3. Le compost de bouse permet l’application simple et rapide des préparations biodynamiques du compost sur un terrain n’ayant pas reçu de compost biodynamique dans l’année. Sa pulvérisation apporte au sol les bienfaits des préparations biodynamiques du compost, les éléments nutritifs du sol s’organisent de manière équilibrée et sont rendus mieux assimilables par les plantes. Le compost de bouse est aussi un excellent accélérateur de la décomposition des matières organiques fraîches dans le sol. Site du Mouvement pour l’Agriculture Biodynamique, Novembre 2017.

La biodynamie en viticulture

Extrait de Vins d’hier et vins d’aujourd’hui, Jacques Fourès, publié dans la revue Biodynamis, décembre 2012.

La biodynamie décompacte les sols éteints et contribue à faire replonger les racines. L’identité du terroir, de la parcelle se retrouve rapidement. (…) On peut donc observer en biodynamie un feuillage plus coloré, plus éclatant, des branches plus rigides, des feuilles plus larges et bien dressées, assez espacées à la base avec un port orienté vers le ciel entraînant une meilleure exposition des raisins au soleil. (…) Les raisins en biodynamie, quelques fois dès la première année, présentent des qualités particulières qui vont faciliter le bon déroulement (de la fermentation, ndlr) : richesse accrue en vitamines, acides aminés et stérols en plus grande quantité facilitant le travail des levures, favorisant ainsi des expressions aromatiques très complexes et franches. La grande diversité des levures naturelles va différencier les parcelles, les différentes cuvées. (…) Les pH plus faibles permettent d’élever les vins avec un minimum de sulfites. En excès, ceux-ci dégradent en effet la dégustation et la qualité finale du produit sans compter les effets sur la santé. Les doses admises de soufre total pour la certification Demeter sont, en gros, inférieures à la moitié de ce qui est admis en conventionnel. (…) Une biodynamie bien conduite développe non seulement la microflore du sol, mais permet également de bénéficier de levures vigoureuses.